Jimbere

Kirundi French English
Actualité

Non, la prison n’est pas la bonne solution pour les drogués

Ce mardi 31 juin, la Bapud (Burundi association of people who used drugs) organisait au Martha Hôtel un panel sur l’usage de la drogue au Burundi : une occasion de faire retentir l’écho de « Support don’t punish », une campagne mondiale contre les politiques répressives concernant les drogues et leurs usagers.

Le but poursuivi par cette association qui compte plus de 1.200 junkies : réfléchir sur les pistes de solution en vue de la promotion d’une jeunesse sans drogue. Un idéal pas si facile à atteindre si l’on en croit les différentes interventions au cours du panel.

En effet, comme l’a indiqué aux participants, Richard Ninihazwe, Coordinateur national de la Bapud, le nombre de jeunes qui se droguent ne cesse d’augmenter à une vitesse inquiétante ː « Il est grand temps de mettre la priorité sur la santé, le bien-être et les droits, de ceux qui usent de la drogue. La lutte contre ce fléau doit plutôt passer par le changement du narratif du regard, et des politiques dommageables qui les veulent inutiles et sans importance dans la communauté ».

Saisissant la balle au bond, le Commissaire Polycarpe Ntakarutimana, à la tête de l’unité anti-drogue de la Police, estime que la prison est rarement la bonne solution. « Il est beaucoup plus question de pouvoir coordonner les efforts de tout un chacun dans la lutte contre ce fléau qui menace la société, et plus particulièrement la jeunesse. Il faut plus de sensibilisation sur les maux de la drogue à partir du foyer familial, mais aussi la mise en place des centres de désintoxication ». Un avis partagé par Pierre Claver Njejimana du Centre Neuro-Psychiatrique de Kamenge : « La plupart de nos patients sont des anciens usagers de la drogue majoritairement constitués par des jeunes dont l’âge est compris entre 12 et 15 ans ».

80% de drogues consommées viennent de la RDC, et 15 % de la Tanzanie

Pour le Commissaire Ntakarutimana, la loi est lacunaire en matière de drogues. « Il faut une loi spéciale. Il est injuste de punir de la même façon celui qui est attrapé en train de fumer un joint, et un autre qui est pris avec plusieurs kg. Il est disproportionné de punir de la même façon le consommateur, le cultivateur et le trafiquant ».

Et d’informer que 80% de drogues consommées au Burundi viennent de la RDC, 15 % de la Tanzanie et le reste cultivé au Burundi, notamment dans la forêt de Kibira ainsi que dans le parc de Ruvubu.

Les drogués, populations les plus à risque de contracter le VIH

Selon une étude de la Bapud de 2019, pour 8.096 toxicomanes recensés dans tout le pays, 49,3 % utilisaient des seringues qu’ils partageaient parfois. En 2017, selon la même étude, la séro-prévalence au VIH Sida était 10 fois supérieure chez les usagers de la drogue que chez les non-usagers, soit 10% contre 1,7%.

Sur ce point, Richard Ninihazwe trouve qu’il faut intensifier les efforts de prévention auprès des usagers de drogues en finançant les besoins en matériel stérile, et en promouvant le dépistage chez eux, ce qui suppose l’éradication de leur stigmatisation. Par ailleurs, la Bapud salut, malgré tout, quelques avancées dans le domaine : « Nous nous félicitons du fait que la méthadone (un médicament permettant aux personnes dépendantes aux drogues de stopper leur addiction tout en produisant un effet de bien-être), ait été enlevée de la liste des produits toxiques. Un hic persiste tout de même :  il n’est pas à la portée de tous ».

À la fin du panel, un participant glissera : « S’ils savaient combien d’adultes se droguent à cause des soucis familiaux, ils verraient qu’il est plus qu’urgent d’agir. Je trouve qu’il faut crever l’abcès en commençant plutôt par s’en prendre sérieusement aux trafiquants ». 

1 commentaire

1 commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

To Top